La première fois que j’ai vu Jivanjili, c’était à la fête du mariage de deux membres de notre Sangha. Un énorme gâteau était dressé sur une table, et la mariée lançait un appel à l’assemblée "Qui va couper le gâteau?" Sans hésitation, une femme s’est dégagée du groupe et commençait à couper le gâteau. Elle maniait le couteau avec facilité.
Cette première rencontre avec Jivanjili résume assez bien l’impression générale d’elle qui s’est confirmée par la suite: quelqu’un qui fait ce qui doit être fait, et ce, sans hésitation.
Durant toute sa vie Jivanjili a été confrontée à de grands défis: de trouver son chemin ainsi que sa sagesse, et de prendre la vie comme elle vient à chaque instant. Je lui ai demandé d’expliquer comment elle a fait pour couper le gâteau en parts égales avec une telle précision.
Jivanjili : Ah, oui, bien sûr je me souviens de ce jour là. En fait, je ne connaissais pas les autres personnes présentes, et je n’avais pas non plus regardé pour voir combien nous étions. Comment peut-on couper un gâteau en part égal pour le nombre exact d’invités? Je dois avouer que je ne sais pas comment j’ai fait. Il y avait juste un gâteau de mariage qui avait besoin d’être partagé.
Alor, je me suis mise debout, j’ai pris le couteau, et j’ai commencé à couper le gâteau. Je me souviens avoir coupé beaucoup de parts, alors que quelqu’un me tendait des assiettes pour distribuer les parts aux invités. Je me suis rendue compte de ce que je faisais alors qu’il restait très peu de gâteau à couper. Une pensée a traversé mon esprit: "Oh mon dieu, combien sommes-nous en tout?" Lorsque je servais la dernière part sur une assiette, quelqu’un m’a dit: "C’est pour toi. Tout le monde est servi." C’était complètement, intuitivement exact!
D’expérience, je sais que lorsque je ressens un besoin de savoir quelque chose ou de faire quelque chose, l’action requise va se révéler naturellement. A l’inverse, lorsque je doute de mon savoir ou de ma capacité sur le plan personnel évidemment, je serai soit confuse ou inhibée et il en découlera un grand stress. Ceci indique des attitudes axées sur l’obtention d’un résultat: Comment dois-je me comporter? Qu’est-ce qu’ils vont penser de moi? Est-ce qu’ils seront d’accord? De telles attitudes sont inutiles car une personne peut trouver un comportement charmant, alors qu’une autre trouvera le même geste agaçant, et ainsi de suite.
S : Est-ce que vous diriez que le fait de se laisser guider par son intuition dépasse toutes les autres stratégies dans la vie? Oui, d’une certaine manière nous pourrions le dire. Les événements se sont succédés à une telle vitesse au cours de cette vie que je n’ai jamais eu le loisir de chercher ce qui était "bien" ou "mauvais", ni ce qui était raisonnable ou déraisonnable.
S : On pourrait dire aujourd’hui que d’une certaine manière que ceci a été une bénédiction : Oui, ceci a été le cas d’une manière certaine. Lorsqu’il y a un incendie, il faut vite trouver la sortie. Il en a toujours été ainsi dans ma vie. Un jour, j’ai demandé à un astrologue: "Qu’est-ce que j’ai fait dans d’autres vies pour avoir une vie comme la mienne?" Il m’a dit, que ce soit vrai ou non, je ne sais pas, mais le concept m’a séduit: "Ton engagement dans cette incarnation a été si total, que tu as brûlé les étapes, et que tu as pris cinq Karma en même temps. Pour naître, tu as trouvé un lieu où tu ne pouvais même pas être tranquille une seconde." Toute ma vie depuis ma naissance, dès que je cessais d’être vigilante, quelque chose de catastrophique m’est arrivé qui bouleversait totalement la situation. L’illusion de trouver la stabilité quelque part, que certaines personnes peuvent avoir, n’a jamais pu prendre racine en moi (un sourire s’envole de ses lèvres). Ainsi, je savais à un âge très tendre que je ne pouvais compter que sur le changement rapide et ce, en toute chose. J’ai appris que je pouvais être dans l’erreur pendant un moment, ou être dans le vrai à un autre moment, et ceci dépend de l’attitude ou de l’humeur dominantes du moment. Quoi qu’il en soit, il m’est apparu évident à travers cette expérience qu’il est impossible de plaire à tout le monde, surtout à ma mère. Pour trouver l’intégrité du cœur, j’ai été amené à aller en moi-même.
S : Vous êtes-vous jamais sentie bouleversée par votre vie ou avez-vous jamais pensé que vous étiez une victime? Non. Malgré le fait d’avoir trois sœurs et un frère, j’ai l’impression d’avoir toujours été en première ligne. Ma famille n’était pas une famille ordinaire ; je ne sais pas si une famille "ordinaire" existe—j’en doute. Lorsqu’on emploi le mot «normalité», on implique forcément une comparaison. Je peux dire que mes parents n’ont pas été capables de nous nourrir et de nous protéger. Ils étaient trop préoccupés de leurs propres vies.
J’ai grandi dans une maison où on nous a appris à "assurer le spectacle" (show must go on); lorsqu’il y avait un problème, j’ai eu l’impression d’être seule responsable de la situation, celle qui devait trouver la solution et faire en sorte que le spectacle ait lieu. Il est possible que ce soit ça qui m’a poussé à me lever ce jour là et à couper le gâteau de mariage. Il fallait que quelqu’un le fasse, donc je l’ai fait.
Enfant vous avez appris à vivre sans savoir ce qui aller se passer à l’instant d’après. Ceci semble un outil bien utile aujourd’hui: C’est exact. Je ne pouvais jamais faire de projet ou planifier ce que j’allais faire, ou compter sur un évènement extérieur, parce que ma mère intervenait toujours. Elle ne supportait pas que nous soyons à l’aise longtemps. Je pense qu’elle avait un besoin d’intrusion, c’est ca le contrôle du mental. L’état d’harmonie implique une liberté d’esprit, et elle craignait cela. Enfant, nous n’étions pas autorisés à parler entre nous. Nous n‘étions pas autorisés à aller dans nos chambres, car là elle ne pouvait pas nous contrôler.
S : Est-ce que vous diriez que vous étiez un défi pour votre mère ? Oui, certainement et il y a un joyau dans cela. Bien qu’elle comptait sur ma présence la plupart du temps, elle disait aussi que ma naissance était une erreur. Elle me disait que c’était mon devoir de passer inaperçue et de faire attention à ne pas être en sa présence. Elle me disait de ne pas lui rappeler que j’existais de quelque manière que ce soit. Il y a de la beauté dans ceci, parce que cette démarche conduit à la focalisation complète de la présence dans le moment. Le danger était partout tout le temps. J’étais obligée d’être vigilante, de savoir à tout moment où elle était et de l’éviter. Le mental n’était pas autorisé à fléchir.
Une fois, j’ai lu des contes des maîtres Zen. J’ai lu comment la nuit venue, le maître visitait les moines endormis, un sabre à la main et comment le sabre pouvait descendre sur leurs oreillers. Si vous ne déplaciez pas votre tête instantanément, elle était coupée. De la même manière, ma mère a peut-être été un maître Zen avec de la compassion pour moi.
S : Comment avez-vous pu gérer ça? Beaucoup de personnes dans cette situation seraient devenues folles : Je croyais ma mère lorsqu’elle me renvoyait une image de moi-même d’une personne mauvaise ou même dégouttante, mais en même temps je regardais à l’intérieur de moi pour me rendre compte de l’étendu du mal en moi, et plus je regardais profondément, moins je trouvais de mal. Alors, j’ai appris à un jeune âge qu’il y a quelque chose en moi qu’on ne peut pas posséder, et qui est indestructible. Quelque chose de profond. J’ai appris que ma mère ne pouvait pas vraiment me détruire, et très vite j’ai commencé à ressentir de la compassion pour elle, car j’ai vu sa grande douleur. Je lui ai dis aussi que je l’aimais, et cela lui a fait très peur.
Il est possible que mon indestructibilité l’ait incité à m’embêter tout le temps. Ceci fut un entraînement intense, jour et nuit!
S : Un espace paisible sans limites. Quels sont les étapes, par lesquelles vous êtes passée qui vous ont amené à être celle que vous êtes ici et maintenant ? Il n’y a rien que je puisse exclure, c’était peut-être de manger un œuf dur, mais je sais ce que vous voulez dire. Avant de vous répondre, je voudrais dire encore une fois que je n’ai jamais été une victime. Je n’ai pas à me plaindre. Un de mes premiers souvenirs concerne le désespoir de ma mère, elle avait vraiment de gros ennuis. Quand j’avais trois ans, elle me poussait sous l’eau. Ma première réaction était de me battre contre elle, et puis je me souviens d’avoir été dans un espace illimité de paix, d’être au calme. J’ai ressenti une liberté totale. Lorsqu’elle m’a retirée de l’eau, j’étais essoufflée. C’était simplement un réflexe physique de mon corps. Je me souviens que ma première impression alors que je remontais à la surface pour respirer était d’avoir perdu cette liberté. L’émerveillement de cette expérience et le désir d’en savoir plus sur cet espace sans frontières ont éveillé en moi pour toujours une envie profonde et un désir de continuer cette quête. Ceci a été le début de la "nostalgie d’un retour chez moi", comme j’avais l’habitude de l’appeler.
Un son universel : Un autre événement marquant de ces souvenirs précoces concerne mes poupées. Je prenais soin avec amour de mes poupées et je parlais avec elles. Une poupée s’appelait Roosje, ce qui veut dire petite Rose, et une autre Olof, une petite poupée en caoutchouc. Je leur donnais toute mon attention. Un soir ma mère est rentrée dans ma chambre et a pris l’une d’elles. Elle l’a mis en haut d’un placard. Je criais si fort et je refusais de me taire. Je me souviens d’avoir été consciente de la puissance du son et consciente aussi de m’être entendue… le son semblait venir de quelque part au-delà de moi. Ma mère s’est approchée à moi, elle a crié "Que-ce que c’est?" Je criais "Est-ce que tu aimerais t’asseoir sur un placard toute la nuit?" Elle m’a rendu ma poupée. Plus tard, elle m’a parlé de cette nuit et elle m’a dit: "Il y avait une telle puissance dans tes cris que j’ai eu peur. J’étais obligée de te rendre ta poupée." Elle avait été touchée tout comme moi. Je n’ai jamais oublié qu’il y a une puissance qui dépasse toutes limites… Et elle "n’appartient" à personne en particulier.
Comme dans un rêve : J’ai des souvenirs vifs de l’événement qui suivit. C’était une expérience profonde. Je devais avoir probablement 5 ans. Un soir au lit dans l’obscurité totale, je regardais le mur. J’ai vu de petites lumières de multiples couleurs se déplacer sur le mur ; elles passaient comme des trains. Lorsque j’essayais de suivre l’une d’elles, celle-ci disparaissait d’une manière imprévisible. Je ne pouvais trouver ni début, ni fin à ces guirlandes de lumières de couleurs qui valsaient devant moi. J’ai remarqué là que la pénombre avait une profondeur, comme un vide. Je me suis rendue compte que lorsque je touchais le mur, il n’y avait pas vraiment le sens de la profondeur. Au fil des nuits, je continuais à regarder et j’ai pensé "Peut-être le vide sans limites, dont je languis n’a pas de profondeur, même pas un millimètre. Mes sens me donnent l’impression qu’il y a de la profondeur, alors qu’il n’y en a pas. Peut-être que rien n’existe vraiment, peut-être que c’est comme dans un rêve. Les adultes doivent le savoir et ils peuvent me l’apprendre."
S : Où étais-je avant ma naissance ? Quand j’ai eu six ans je suis allée à l’école. Je m’attendais à apprendre la vie. Ce n’était pas le cas: on nous apprenait l’alphabet ABC… et de nombreuses autres choses, mais pas ce que je cherchais.
Mon père était le médecin du village, et quand j’ai commencé à aller à l’école, de nombreux enfants voulaient m’accompagner à la maison lors des premiers jours de la rentrée. Je pensais que ces enfants m’aimaient beaucoup et étaient mes amis. Ma mère m’a dit que les enfants ne venaient pas chez nous pour être avec moi ; elle m’expliquait que les enfants venaient parce que leurs parents leur avaient dit que dans la maison du médecin les nouveaux bébés étaient rangés dans le sous-sol. Dans notre région, on racontait cette histoire aux enfants pour expliquer d’où venaient les bébés. Cependant, ma mère m’a expliqué comment les bébés grandissent dans le corps des femmes ; elle m’a dit que je suis née de son ventre et que je suis donc sa fille. Avec ses mots, je lui ai répondu "Cela ne peut pas être. Je ne peux pas être ton enfant. Où étais-je avant de naître?" Je savais simplement qu’il y avait un début sans fin en moi. Ma mère ne comprenait pas ce que je voulais savoir ; il est possible qu’elle n’ait pas entendu ma question. Elle a répondu: "Oh…… Dieu seul le sait."
La maison de Dieu : Le village où ma famille habitait était très croyant ; ceci s’exprimait d’une manière dogmatique et rigide. Certaines personnes au village ne voulaient pas être soignées par mon père, parce que notre famille n’allait pas à l’église. Cependant, quelque part j’avais appris que l’église était la maison que Dieu habitait. Ainsi, un dimanche matin alors que j’avais 6 ans, j’ai décidé d’aller toute seule à l’église. Je suis partie en faisant attention à ne pas être remarquée. J’avais hâte de trouver des réponses auprès de Dieu, puisque personne ne semblait capable de me dire ce que je voulais savoir. A l’église, j’ai trouvé seulement des personnes avec de érieux visages allongés, et tous vêtus de noir. Rien n’a été tel que je l’avais imaginé… Après quelque temps, j’ai ressenti que l’église n’était pas l’endroit pour trouver des réponses… Silencieusement, je me suis retirée de l’église. Je n’ai jamais confié cette expérience à personne. Ce jour là, j’ai compris que j’étais seule au monde.
Méditation au cimetière : J’ai commencé à rechercher le silence du cimetière. Je serai bien restée pendant des heures… avec le sentiment que j’étais très près de "la maison"… J’ai passé des heures et des heures à étancher ma soif de "nostalgie de la maison" dans le calme des cimetières. Rétrospectivement, je pense que ceci était une forme spontanée de Vipassana. J’ai été amenée à comprendre que quelque chose ne tournait pas rond chez moi. (Sourire)
L’étude de la vie : Je n’ai jamais renoncé à ma quête de réponses. Lorsque j’avais dix ans, je demandais l’encyclopédie médicale pour mon anniversaire. Je pensais qu’il pourrait y avoir des réponses en faisant l’étude des cellules du corps humain. J’ai eu les dix volumes, et je les ai tous lu. Encore une fois le mystère de la vie m’échappait.
Pas de temps pour l’amour : Après le lycée, je suis allée dans une école d’infirmiers dans l’espoir de comprendre le mystère de la vie, à travers le regard qu’on pourrait avoir des naissances et des morts à l’hôpital. Mais je n’ai rien trouvé de semblable à l’amour que je voulais donner. Je me souviens avoir entendu un médecin dire à une patiente qu’elle avait un cancer. Il lui a donné l’information et presque immédiatement il est parti. Elle avait peur et pleurait, alors je suis allée m’asseoir avec elle un moment et nous avons échangé quelques mots. A ce moment là, la surveillante est arrivée et a dit: "Oh, je vois que vous n’avez rien à faire. Ne perdez pas votre temps, allez-vous rendre utile ailleurs."Être un humain signifiait ne rien faire, c’était perdre son temps." Ma carrière d’infirmière fut de courte durée après cet incident. Bon nombre de mes illusions étaient maintenant parties, pas ceci, pas cela.
L’organisatrice : Par une grâce, j’ai été embauchée comme manager pour une société de cinéma. Nous étions responsables de l’organisation d’un grand festival international de films qui avait lieu tous les ans. Des milliers de spectateurs y assistaient et tout le centre ville y participait. C’était comme le gâteau de mariage, j’acceptais le travail et je l’ai fait sans me poser la question si j’avais la capacité ou non de le faire. Lorsque je regarde en arrière, je suis incapable de dire comment ça s’est passé à cette période de ma vie Des idées me sont venues, ont pris formes et ont été exécutées. A travers cette expérience, j’ai appris que lorsque la question est là, la réponse doit aussi être là. Ce n’est pas une question de connaissance. J’ai compris qu’il y a une qualité dans l’action qui est au-delà de l’évaluation du plan "personnel".
Marchant sur le bord du gouffre soutenu seulement par l’intuition, personne ne sait : La conscience existe d’une manière spontanée et complète, et on ne peut pas vraiment connaître quelque chose ou contrôler un problème. Mon expérience m’a démontré que d’être libérée de résultats préconçus, de la peur de l’échec, ou du désir de réussir, permet l’émergence de l’action juste. Être libre de ces fardeaux du mental, apporte la clarté et une capacité bien au-delà de tout ce que tout ce que notre perspective très limitée nous laisse imaginer. L’action qui vient de l’intuition est authentique et insouciante, cela ne veut surtout pas dire agir sans attention. C’est même le contraire qui est vrai.
S : Y-a-t-il d’autres moments clés que vous voulez évoquer pour nous ? Le mariage et l’étonnante expérience de mettre un enfant au monde. J’ai trois filles. Lors de chaque grossesse, j’étais pris par la pensée que lorsqu’une nouvelle vie se développait à l’intérieur de moi, au moment d’accoucher, je saurai sûrement quelque chose qu’on ne peut pas connaître par la lecture des livres. Un peu du mystère pourrait être révélé dans cette expérience profonde de l’existence. (Jivanjili sourit)
Et effectivement, l’expérience de la maternité a été riche et intense. Lors de l’accouchement, j’ai expérimenté la douleur sur un plan qui rivalisait la puissance universelle que j’avais vu dans mon enfance. J’ai expérimenté aussi une joie profonde qu’on peut qualifier seulement d’universelle et qui est indescriptible. Lorsque je tenais mon premier enfant dans mes bras, je regardais dans ses yeux et j’ai dit: "Ton nom est Sacha." C’était un geste profond et spontané. Je regardais dans ses yeux où je voyais rien et j’ai dit: "Ton nom est Sacha. Je ne pourrais jamais te posséder ; tu es venue dans mes bras pour être soutenue et guidée sur ton chemin encore inconnu, jusqu’au jour où tu puisse marcher sans mes mains posées sur tes petites fesses."
D’une certaine manière tous les yeux évoquent le vide et l’énergie ; ma manière de regarder quelqu’un dans les yeux peut être légèrement différente, les yeux montrent un grand secret : Oui, c’est étonnant ! Le vide est potentiel et complètement impersonnel. Vous pouvez le voir. J’ai regardé dans les yeux maintes fois ; j’étais et je suis toujours fascinée! J’ai regardé les yeux de moutons, de chevaux, de vaches, d’oiseaux, et des fleurs… J’ai continué à regarder jusqu’au bout, jusqu’au moment où, jusqu’à ne voir seulement qu’Un seul œil! J’étais aussi étonnée par le regard de chiots, par la manière qu’ils regardaient dans mes yeux dix jours après leur naissance lorsque leurs yeux s’ouvraient pour la première fois. Je me demandais comment cela était possible, mes yeux étaient si petit, vue de leur perspective. Cependant, leurs yeux cherchaient les miens et nous nous fondions l’un dans l’autre. La lumière est juste sur la lumière. Mon vœu le plus cher est qu’un jour nous puissions tous nous regarder les uns les autres avec un regard vide, avec des yeux de pur amour. De cette manière, tout peut être reflété tel quel, sans analyse ou invalidation.
Regarder avec des yeux vides est l’amour inconditionnel. Tous les détails sont sans conséquence dans cette perspective.
Pas de vie sociale: Après la naissance de nos trois enfants, mon mari a terminé ses études de médecine et s’est spécialisé en radiologie. Il avait un certain succès et était très demandé comme conférencier dans des séminaires un peu partout dans le monde. Pendant une période d’un an l’Université de Californie à Davis a invité toute la famille à vivre aux États-Unis. Lors de notre deuxième jour en Californie, j’étais invité à prendre le thé avec d’autres épouses du personnel enseignant de la faculté de médecine. C’était une fête dans l’esprit d’"Alice au pays des merveilles". On m’a épinglé un badge avec une bordure verte qui indiquait aux autres que j’étais une nouvelle recrue sur le circuit. Toutes m’ont approché avec un grand sourire. Toutes m’ont salué de la même manière: "D’où venez-vous?" Et avant que je puisse leur répondre, elles étaient parties. Une femme est venue près de moi, et je l’ai entendu dire "Regardez comme elle est mignonne ; elle sera très demandée sur le circuit." Je souriais, j’ai pris mes enfants et j’ai quitté la fête. Quand mon mari est rentré ce soir là, je lui ai demandé si c’était important pour sa carrière que je participe à ces fêtes organisées pour les épouses. Il a répondu "Non". Je pense maintenant que c’était une erreur de sa part, mais il ne s’est pas rendu compte à ce moment là.
Libérée de ces obligations d’ordre social, je me suis inscrite à l’école des beaux-arts, et j’ai repris des cours de ballet. C’est là que j’ai rencontré quelqu’un qui me parlait d’un cours de communication proposé par des scientologues. Le sujet m’attirait immédiatement. J’ai suivi le cours et j’ai acheté un livre de L. Ron Hubbard. Toutes les pièces du jeu de dominos semblaient se mettre en place lors de la lecture de ce livre. J’avais trouvé une information qui résonnait profondément en moi, quelque chose que je ressentais que je connaissais. Tout ce que j’étudiais pouvait être appliqué à la vie et ceci m’épatait. Ce n’était pas une théorie et j’étais éprise par cette approche. Je me suis littéralement jetée dans le matériel du cours avec un tel élan que j’ai pu obtenir une bourse de l’organisation. C’était une très bonne chose pour moi, car les cours de scientologie sont très chers ; ainsi j’ai pu étudier la scientologie plus tard presque gratuitement à Amsterdam. J’ai tout étudié, tout ce que je trouvais sur le sujet. Je n’ai jamais été "accro" à l’église de scientologie, comme on l’appelle. C’est impossible pour moi d’être "membre" de quoi que ce soit. L’entière période d’étude a été pour moi une immense reconnaissance et une joie pour un cœur assoiffé.
Un certain temps est parfois nécessaire pour faire le lien entre ce que nous savons déjà et les concepts que nous utilisons pour décrire ces expériences : Je suis totalement d’accord. Aujourd’hui, le mot "méditation" est connue partout ; ce ne fut pas le cas pour les gens de ma génération, je suis née en 1945. J’ai entendu parlé de Krishnamurti, Da Free John, les Maîtres de l’Orient, et j’étais très touchée et impressionnée. L’introduction au concept de "l’illumination" me semblait le nec plus ultra des possibilités pour l’esprit de l’espèce humain. Dans la Véritable Quête de mon cœur, j’ai enfin ressenti que j’étais près de la "maison". J’étais étonnée quand j’ai constaté que je ne pouvais d’aucune manière partager ces découvertes avec mon époux ou avec mes amis. Ils étaient tous intellectuels. J’étais persuadée que leur intelligence leur donnerait l’envie de connaître la dynamique de la vie et au-delà. Qui n’est pas étonné lorsqu’il regarde les étoiles dans le ciel de nuit? Qui n’est pas émerveillé lorsqu’il ressent les battements de son cœur? Cependant, ils semblaient plus intéressés par le Beaujolais Primeur que par ce que je pouvais leur dire. Je ressentais des sentiments de solitude et de suffocation. Cette situation s’est terminée finalement par le divorce. Je me trouvais seule avec mes trois filles et les écritures. Ce fut un énorme tournant dans ma vie. Encore un nouveau départ…
Le rencontre avec Osho : Osho est arrivé dans ma vie grâce à une vidéo de lui ; j’ai été profondément touchée. A propos des yeux vides… Oh….
Cet Être transparent rayonnait une telle puissance vide. J’ai ressenti un amour profond pour Osho et je me suis inclinée à ses pieds. Je lui ai écrit pour lui dire que j’avais étudié tout le matériel de la scientologie dans une attitude de stupéfaction et d’émerveillement, et qu’aujourd’hui, je me sentais comme une encyclopédie ambulatoire, alors que mon cœur avait envie de danser dans l’amour. Il m’a donné le nom Prem Savaab, qui veut dire "l’Amour est la réalité". Ceci est un grande étape, n’est-ce pas? J’avais enfin trouvé le Vrai Maître!
Une confirmation : Oui, et puis l’étape suivante est arrivée quand j’ai appris qu’Osho avait quitté son corps. Ce fut un moment très profond dans ma vie. Je ne savais pas qu’il était en train de quitter son corps. J’étais en Hollande, mais je me souviens que quelqu’un était assis à côté de moi sur un canapé, soudain j’avais l’impression que mon crâne s’ouvrait, et j’étais portée hors de mon corps. Dans une transparence totale et illimitée, comme dans la situation de noyade de mon enfance. La personne assise à côté de moi a pris peur et m’a saisi. Quelques heures plus tard nous avons appris qu’Osho était mort. J’ai pleuré et en même temps je ressentais qu’il ne pouvait pas vraiment partir. J’ai compris dans des profondeurs de mon Être que la conscience ne dépend de rien, même pas d’un corps! J’ai pris conscience que dedans et dehors n’existent pas vraiment.
La dernière technique de méditation qu’Osho nous a laissé s’appelle "Méditation de la Rose Mystique". La méthode consiste en, une semaine de rires… trois heures par jours, une semaine de pleurs… trois heures par jours, puis une semaine de méditation silencieuse … trois heures par jour.
Je me suis rendue en Inde pour faire Prânam au Maha Samadhi d’Osho, et je me suis inscrite au stage de méditation. La dernière semaine du stage a eu lieu dans le couloir vitré et climatisé du jardin d’Osho. J’étais assise dans le couloir dans un état de méditation paisible et profond lorsqu’un cygne s’est précipité à la vitre devant moi. Il a déployé ses ailes, et j’ai entendu une voix d’homme forte et claire émanant du cygne qui disait: "Ca c’est la qualité de ton Être. N’accepte pas moins que ça." C’était clair pour moi que je n’allais pas ignorer cette voix ; le temps de la compromission et de la négociation était terminée! De retour en Hollande, je me souviens de m’être assise à ma table avec mes mains vides dans tous les sens du terme et j’ai dis: "Dieu, d’accord, je suis morte et alors, qu’on m’apporte du pain et de l’eau ; maintenant Tu me dis ce que j’ai à faire."A partir de ce moment, les gens sont venus me voir pour parler de leurs vies, et les groupes de méditation se sont crées, si bien que je n’ai rien fait et tout est arrivé. J’avais l’impression que ce "non-travail" était vraiment le travail d’Osho, et à travers l’ambiance raffinée des murmures d’amour, j’ai été guidée par Lui.
Le fruit est mûr : Pendant plusieurs années ceci a été ma vie, jusqu’au moment où j’ai eu peur, et j’ai commencé à douter de mes activités. Après tout, je ne savais pas très bien ce que je faisais, et de plus en plus de gens arrivaient et s’abandonnaient à mes pieds. J’ai vu qu’ils m’aimaient et pour moi il n’y avait pas de réalité dans ce que les gens prenaient pour vrai. Pendant longtemps je ne pouvais pas trouver un "moi". Qu’est-ce que je faisais avec ces gens? J’avais même l’impression de pêcher en travaillant de cette façon… il m’est venu à l’esprit que je pourrais même être en train de décevoir les gens. J’étais désespérée et j’ai crié au ciel "Osho, s’il te plaît, parles moi pour une fois avec une voix forte!" Un ami qui m’a trouvé dans cette situation désespérée a proposé de me conduire au centre d’Osho à Amsterdam afin de faire une coupure avec mes activités quotidiennes. Dès notre arrivée, nous sommes allés nous asseoir seuls dans le grand hall ; puis un Sannyasin est arrivé nous demandant de partir, parce que l’espace était loué pour le soir. Je n’avais pas envie de bouger et je suis restée. D’autres personnes sont arrivées et ont pris place dans le hall… et puis une femme est rentrée dans la pièce. Je n’ai vu que son gros orteil rentrait dans l’espace et j’ai eu un choc. Je me suis vue moi-même. Elle a pris place devant l’auditoire et a commencé à parler. Elle a abordé mon sujet immédiatement sans que je dise un mot! Je me suis sentie si complète que je n’ai rien entendu de ce qu’elle a dit, tout est neutre. Les seuls mots qui sont arrivés après un moment étaient: "Je suis en train de me voir en toi". Ces mots je ne les ai pas prononcé, je ne bougeais pas… J’étais abasourdie. A la fin de la soirée lorsque les autres partaient, je ne bougeais toujours pas et quand quelqu’un que je connaissais est venu vers moi, je pouvais seulement murmurer: "Qui est cette femme? " Il m’a répondu: "Son nom est ShantiMayi et c’est un maître éveillé. Son domicile est à Rishikesh, en Inde, en hiver" Je savais qu’elle était mon Maître. Ainsi j’ai pris un billet pour lui rendre visite en inde ; je voulais lui parler, lui dire qu’elle était mon Maître, bien qu’Osho soit mon Maître, maintenant que pouvais-je faire?
D’une certaine manière je savais qu’Osho m’avait donné le plus grand cadeau qu’il puisse me faire, et c’était ShantiMayi. Le lendemain de mon arrivée à Rishikesh, j’ai pu avoir un rendez-vous avec ShantiMayi. Je me suis agenouillée à ses pieds, et j’ai dis "Tu es mon Maître!" "Oui" elle m’a répondu et nos regards se sont fondus en Un. Tout ceci a été si évident et si fort que je ne me suis jamais posé de question, à aucun moment! A Rishikesh, j’ai entendu pour la première fois que "Sacha" était le nom de la lignée de ShantiMayi. Lors de notre première conversation, je lui avais expliqué que j’avais donné ce nom à ma fille aînée. Sa réponse était: "C’est beaucoup plus grand que tu imagines. " Une fois encore soudain je prenais conscience que l’on ne peut pas conceptualiser la profondeur du cœur. C’est vraiment beau de réaliser cela.
Quelques mois plus tard j’ai trouvé une carte postale d’Elle dans ma boîte aux lettres. La carte est arrivée le jour de mon anniversaire ! Elle écrivait: "C’est notre tour en conscience de ramener l’humanité à nouveau vers son aspect humain. Tout ce que nous avons à donner c’est l’Amour, également à ceux qui ne le méritent pas. Ceci rend l’amour encore plus précieux. Si tu avais demandé un nom, le nom que je t’aurais donné est Jivanjili. Ca veut dire: Ma vie est une offrande au Soi intérieur, ainsi qu’une prière. Vivre et aimer, ShantiMayi."
Mon cœur se réjouit avec gratitude de cette bénédiction. Le nom Jivanjili porte la plus fine résonance.
Voici grosso modo, les étapes majeures par lesquelles je suis passée. Et puis, il y aura toujours des étapes…Totalement vides et éternelles. C’est le sens du mantra "Gaté Gaté Paragaté Parasamgaté Bodhi Svaha".
S : Est-ce que tu lui avais fait part de ton impression d’avoir triché d’une certaine manière dans ton travail avec les gens ? Oui, il y avait encore une trace de quelque chose de mon enfance, l’idée que j’étais si mauvaise et une pécheresse par définition… (sourire). Je me souviens de Lui avoir dit: "Je veux être très honnête avec toi. Je ne suis pas réelle, et en réalité je n’existe même pas. Je crains tout simplement d’être folle… Je ne suis ni ça, ni ça."
Elle regardait profondément dans mes yeux, et elle a dit "Tu es sur le bon chemin." A ce moment là, je savais qu’elle avait raison, bien que je sois incapable de dire comment. J’étais complètement perdue. Elle était mon sauveteur. Lors du premier Satsang après cette rencontre, elle jetait des oranges pour le Prasad.... Elle jetait une orange dans mes mains en exclamant "Le fruit est mûr!" J’ai fait semblant de ne pas avoir entendu. J’aurais préféré passer à côté d’une chose pendant des vies et des vies, au lieu de la "comprendre" une seconde trop tôt.
S : Je t’ai vu donner tant à ton Maître, comme si ceci prédominait dans ta vie. Jivanjili: Alors, ça je ne le sais pas. Ce que je sais est que je dois tout à mon Maître. Tout ce qui peut être donné est libéré par Elle et Elle seule. C’est de la joie pure de donner à ShantiMayi et ce n’est jamais pour elle, c’est simplement déversé ce qui peut bénéficier à l’œuvre dans sa totalité. Je ne vois pas ceci comme le fait de "donner", et ShantiMayi reçoit d’une manière inconditionnelle, ce qui veut dire qu’il n’y a aucun attachement. Un cœur qui donne sans condition, sans le sens de "Je donne", ne peut pas être pollué par cet acte. Donner d’une manière inconditionnelle, c’est donner sans façon, sans une attente. Elle est la première personne, excepté mes enfants, qui m’a permis de faire l’expérience de la joie vraie simplement par le fait de recevoir dans la Pureté, sans calcul, sans la notion de supériorité ni celle de donner et de recevoir. Mon cœur se réjouit devant cette expérience qui m’a appris énormément sur l’amour en action. Que vaut l’amour lorsqu’il n’est pas en action? Lorsque vous regardez profondément vous voyez que l’Amour est d’Aimer… Il n’y a pas d’immobilité dans ça, c’est vivre en liberté. Nous sommes Un… et ainsi en effet rien n’est jamais donné ni pris sauf à l’Un, par l’Un. Le Un ne connaît pas la dualité. J’ai un marque page qui porte une citation de ShantiMayi. "Le joyau véritable est de savoir qu’il n’y a pas de récompense." C’est ça la liberté.
S : J’ai été conditionné par le fait de penser que je pourrais comprendre beaucoup de choses. A cause de cela, j’ai perdu beaucoup de temps. Il y a une beauté aussi en cela, d’essayer de comprendre ce qui ne peut pas être compris. C’est un paradoxe, parce qu’il a également quelque chose à avoir avec la compréhension et en même temps, la compréhension est impossible à atteindre: Oui, vous pouvez aller loin avec la compréhension. Plus la compréhension est profonde, plus vaste est l’amour… jusqu’à arriver à l’Un, l’Amour seul. Nous pouvons aller loin dans l’investigation et la compréhension… jusqu’aux molécules… Faisons simple: Dès que vous cherchez la racine de la pomme de terre dans votre assiette… son origine, vous voyez qu’il n’y a pas de fin, pas de repos, et vous êtes perdu très vite dans la compréhension. Comment pourrions nous jamais comprendre l’humidité de l’eau et vice et versa? Pas de début, pas de fin…tout disparaît dans le Un…en Personne. Ceci est le nom que ShantiMayi a donné à notre humble centre: Centre Sacha Le Un en Personne
S : D’une certaine manière, c’est une autre forme de compréhension. Je voulais comprendre, je voulais fixer la clarté dans un concept "profond", je voulais savoir qui j’étais et je ne pouvais pas. Comment tu voulais te trouver lorsque tu étais un enfant ? Oui, mais à ce moment là ; surgit une autre compréhension, une notion d’unité, d’un potentiel au-delà de toutes apparences. Je voulais faire une distinction entre la compréhension intellectuelle et l’intelligence. L’intelligence que le Gayatri Mantra évoque est une forme de compréhension intuitive, et plus celle-ci est profonde, plus le tout devient transparent. Le cœur est un ciel grand ouvert qui devient de plus en plus clair, parce que la compréhension intuitive et "la voie" du cœur vont de paire. C’est pour cette raison qu’il est si important pour le disciple de prendre la clé offerte par le Maître et l’appliquer. Ceci amène le raffinement sur le raffinement. Prendre les outils offerts par le Maître sans analyser est le cadeau le plus délicieux que l’on puisse offrir au cœur. Le cœur se réjouit du fait de se plier et de céder, parce c’est sa nature d’être illimité. Dans cette danse réceptive et fluide, la Nature Vraie se révèle sans le questionnement de logique ou d’illogique. Vous ne pouvez pas être déçu par celui qui comprend sur un plan intellectuel ou d’érudition, regarder simplement comment cette personne est dans la vie. N’importe qui peut dire n’importe quoi, seulement vous voyez comment il/elle verse une tasse de thé. Cela veut tout dire.
S : L’offrande du thé. Tu as reçu la bénédiction de ShantiMayi pour donner le Satsang. Est-ce que tu peux en dire quelques mots ?
Oui bien sûr, et en même temps je ne peux pas vraiment parler de cela. Le sujet entier reste dans le domaine de ce qui ne peut pas être prononcée dans le sens le plus large. Mais, je peux raconter comment ça c’est passé. Au cours de l’été 2001, ShantiMayi a invité trois de ses disciples à Terre de Sacha, notre Ashram dans les Pyrénées françaises,il s’agissait d’Amitabha, Susan, et moi-même. Susan et moi avons voyagé ensemble, et comme nous ne nous connaissions pas très bien, nous avons partagé une destinée commune rare durant ce voyage, ça c’est certain.
ShantiMayi nous a invité à prendre le thé. Ceci a eu lieu dans son jardin derrière la maison sous le seul arbre, celui qui appelle toujours d’un murmure pour prendre place sous ses branches. Le thé nous a été offert dans de petites tasses. ShantMayi les a donné avec une grâce et une simplicité qu’on ne peut définir que comme de la Lumière Pure et Aimante. Encore et encore nos tasses ont été remplies… Alors que nous étions en train de rire et de parler de toutes sortes de choses agréables, rien de spécial… et quand même… Oh…!
Nous n’avons pas reçu d’instructions particulières… on nous a offert le thé. Le thé de Bodhidharma versé dans une tasse que personne ne peut saisir… Quel enseignement profond… Les larmes me viennent encore aux yeux lorsque je me rappelle du touché soyeux de Sa main offrant le thé… et ça au milieu des échanges de paroles et des rires. Tout est LA en même temps.
S : Les différences se dissolvent dans le cœur Un. La Hollande et l’Inde sont très différents culturellement, et dans leur manière d’aborder des sujets spirituels. Vous faites partie d’une lignée avec ces racines en Inde ; comment parlez-vous de ceci avec vos élèves en Hollande ? Lorsque par la grâce, on reconnaît son Maître, l’univers entier se réjouit dans l’instant même. Il y a une profonde et impersonnelle alchimie dans une telle rencontre, un vrai mystère. Comment à ce moment là peut-on parler de l’Orient et de l’Occident? Comment peut-on parler d’une tradition qui est séparée de quelque chose? Imaginez que vous êtes dans la galaxie la plus lointaine, au-delà de l’espace et du temps, et essayez de voir où se trouvent l’Orient et l’Occident, essayez de détecter une tradition confinée. Rencontrer son Maître n’est pas au-delà de la logique ; il n’est pas non plus illogique… C’est une rencontre dans le cœur UN et au-delà. L’analogie la plus significative serait d’imaginer le fer qui est attiré irrésistiblement vers l’aimant. Est-ce que le fer prendra en considération la forme de l’aimant? Ca, c’est la révérence, l’émerveillement, la beauté. Ceci implique la liberté instantanée de tout choix ou l’état hors du choix. L’Orient et l’Occident, une tradition ou une autre… Ils disparaissent tous dans une telle reconnaissance.
La lignée Sacha chérit le Gayatri Mantra dans le cœur. Nous chantons ce Mantra pour l’éveil de tous les Êtres en voie d’éveil. D’après mon expérience, dès la première audition du Gayatri Mantra, les élèves sont immédiatement attirés par Sa résonance. C’est la résonance de Savitur, le Soleil… Le Soleil qui brille également sur l’Orient et sur l’Occident, le Soleil qui ne connaît pas de distinction. Ceci s’appelle l’amour inconditionnel, et ici le mot "inconditionnel" veut dire "inclusif", sans condition, ni exclusion. Dans cette lumière, l’élève se sent à la Maison. Cette maison, ce cœur, ne connais pas l’expérience de l’opposition.
Grâce à mon site Internet, j’ai des élèves dans le monde entier… En Orient comme en Occident, et je ne me souviens pas que cette situation ait présenté le moindre problème.
Lors d’une visite avec le Dalaï Lama il y a quelques années, je lui ai entendu dire: "Il y a de nombreuses Portes du Dharma ; et l’essence est la même." Om Mani Padme Hum: Le joyau est dans le lotus du cœur.
S : L’Inspiration. Qu’est ce qui vous inspire maintenant ? Ce qui m’inspire? Je ne peux pas vraiment le définir. C’est aussi mystérieux que la relation Gourou/disciple… Je vis en neutralité totale et en fait je me sens la plupart du temps "vide", dégagée de tout conditionnement.
Cependant, j’ai observé que ceci implique une ouverture sans limites…L’inspiration a lieu dans une spontanéité inconnue et elle est étonnamment fraîche et enthousiaste. Alors, lorsque tu me poses cette question, je dois répondre que je ne ressens pas une "dynamique" particulière qu’on peut définir comme telle. Autrefois je pensais que quelque chose devait se passer comme: "AH, je veux vivre pour l’éveil de tous les êtres capables de percevoir, c’est à dire sur le chemin de l’éveil!" Le vœu du Bodhisattva, que j’ai pris, est exprimé comme ça. En même temps je n’ai jamais pu trouver un tel sentiment que je pouvais appeler «mien».
Le mot "enthousiasme" veut dire "vivant en Dieu" (Theos veut dire Dieu), et ceci peut être très subtil et à peine détectable si on peut même utiliser le mot "détection"… Ceci m’inspire, puisqu’il transcende toute notion de "moi" et nous oblige à vivre la tête baissée et avec les mains éternellement vides! Maintenant, je peux dire simplement que je respire, que je suis ouverte, que j’ai la volonté d’être un simple serviteur d’un concept élevé "Le Réveil à la Conscience Sacha", et cependant la douceur de mon cœur l’appelle ShantiMayi, parce que ceci est comparable à un nectar sur la langue qui ne peut pas être limité par quoi que ce soit. C’est Elle qui prononce le Satsang dans cette lumière.
J’ai observé qu’une fraîcheur spontanée permet le plus grand enthousiasme lorsque les élèves viennent avec un cœur assoiffé, lorsqu’ils se présentent comme mûrs avec un désir ardant de faire partie du voyage pour regarder à travers l’erreur et les notions fausses. C’est une sensation vibrante lorsque les élèves sont amenés à formuler des questions pointues, et il y a une telle vitalité lorsqu’on rencontre un cœur ardant. J’aime tellement le mot "Tapasia" qui veut dire "le désir du cœur". Il y a rien plus doux sous le Soleil que de voir les élèves s’ouvrir comme la fleur de lotus, et d’être un témoin lorsque leur cœur de diamant se révèle. Il n’y rien de plus doux pour le Cœur, que de le voir découvrant au delà de lui-même la qualité de souplesse, vide et illimitée. C’est alors que je ne peux plus percevoir une inspiration confinée et le moment est éternel… Toutes les saisons sont inspirées pour être exactement ce qu’elles sont dans cet instant. Ceci est la révérence et l’émerveillement au-delà de la compréhension, si riche et en même temps complètement vide.
Langue originale : anglais
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